La nuit d'Halloween

Cette nuit-là, le vent soufflait fort. Non seulement il soufflait fort, mais ses sifflements faisaient croire à des cris d’âmes qui déchiraient le silence de la nuit.
Il n’était pas loin de dix-huit heures au moment où la foudre commençait à tomber. Des coups de tonnerre faisaient vibrer les fenêtre de l’auberge dans là quelle je consultais mes missives une à une.
Je venais tout juste de poser ma plume, quand un homme trempé des pieds à la tête se dirigeait vers moi. Il ôtait sa cape dévoilant enfin son visage.

Bonsoir Messire. J’ai été chargé d’apporter un message à chaque personne habitant ce royaume. Rassurez-vous, je ne suis point le seul. Le royaume est trop vaste pour qu’un seul homme livre un message d’une telle importance à toute la populace pour les informer de la nouvelle que maître Galoregor nous a ordonné de faire connaître.

Il me donnait la lettre imprégnée du sceau de notre bon et unique Roy et partait tout en remettant sa cape d’un geste vif.

Perplexe par rapport à ce que pouvait bien être cette nouvelle, j’ouvrais l’enveloppe, sortais le petit morceau de papier... je le glissais doucement en dehors de son emballage quand soudain...

BBBBRRROOOOOOOOOOOOWWWOOWOOWWWW

Un énorme coup de tonnerre m’a fait sursauter. Je reprenais mon calme et posais la lettre sur ma table, j’y avais lu ces mots :

Un mage aux pouvoirs occultes vient d’entrer dans notre belle cité. J’ordonne à tous nos hommes de se lancer à sa poursuite, de le traquer et de le tuer !
C’est notre empire qui est en danger. Merci de faire preuve de courage et de vous attaquer directement à cet individu.

Galoregor, chef suprême de Nedmor.

Effrayé par ce que je venais de lire, je me levais brusquement. Si Galoregor nous envoyais cette missive aujourd’hui, c’est parce qu’il devait avoir du mal à gérer la situation. Aussitôt je m’emparais de ma fidèle Hache et commençais à courir vers le coin des Artisans. Mes pieds s’enfonçaient dans la boue, visqueuse et collante. Je me déplaçais avec peine, mais je n’avais pas besoin de me déplacer d’avantage car à ce moment-là, j’apercevais une sombre silhouette poursuivie de près par mes compatriotes Royalistes. Sans plus attendre je fonçais à mon tour pour mettre le Mage à terre ou le faire fuir. Ma charge avait été vaine, d’une seule frappe il m’envoyait valser dans les airs, moi et mes compagnons.
Inerte sur le sol, je me rappelais mes dernières heures passées à chasser seul comme à mon habitude, à la tempête qui s’était soudainement levée, à la missive du Roy... « il faut que je me reprenne en main, mon amour-propre est en jeu. »
Les cheveux dans la boue, les vêtements mouillés et collants je me levais doucement, je scrutais les environs à la recherche de l’endroit où ma hache avait bien pu tomber.
Je regardais tout au tour de moi mais ne voyais rien. Je faisais quelques pas pressés à sa recherche quand je la retrouvais enfin plantée dans un arbre qui avec le temps noir ressemblait d’avantage à un monstre qu’à un arbre. Je m’efforçais tellement pour l’extraire de cet arbre que j’en devenais rouge. Après quelques efforts, ma hache étais sortie d’affaire mais en me retournant je tombais nez à nez avec un fantôme. Mes jambes tremblaient tellement qu’elles se tapaient l’une contre l’autre.
Une boule me serrait la gorge. Finalement je reprenais petit à petit mon courage et pourfendais d’un gros coup de hache le fantôme qui se dissipait.

La ville semblait cependant être déserte... à part chauves-souris, citrouilles volantes, petits golems et autres créatures mystérieuses, j’étais seul... Pas une personne ordinaire.

Je regardais encore une fois au tour de moi quand un rire diabolique déchirait le silence, je me retournais en direction du toit de l’auberge et y voyais le Garde Sombre qui riait à n’en plus finir. Puis après quelques instants, il déclara d’une voix convaincue :

Je viens de faire plier Nedmor et ses forces à mes pieds, il ne me reste plus qu’à nettoyer Cyrosh et Fuisserage. Misérables humains que vous êtes !

Puit dans un nuage de fumé il disparaissais sous mes yeux effrayés. Je me demandais ce qu’allait devenir le beau Royaume d’Alidhan, j’ignorais si il avait atteint son but mais je retournais dans ma chambre. Ce combat ne me concernait à présent plus du tout.

Je me retrouvais à présent seul dans la capitale. Je regardais au tour de moi, des cadavres dégoulinants de sang, des enfants pendus aux arbres, des femmes massacrées et pas très belles à voir...
C’était vraiment une nuit d’horreur. Je m’étais à peine remis à marcher en direction de ce qu’il restait de l’auberge quand je mis le pied sur un crâne, un crâne pas très ordinaire, cela semblait être à première vue la tête d’un homme percé de part et d’autre.
J’avais pris le crâne dans mes mains, je l’admirais, le tournais dans tous les sens puis je le jetais comme si ce n’était que les restes d’une pomme.

Je continuais ma route, j’étais quasiment arrivé à l’auberge quand une voix me dit :

Jeune homme, qui es-tu pour me traiter ainsi, ton manque de respect va te coûter cher ...

Mon cœur s’était mit à battre très vite... Cette voix glaciale me faisait froid dans le dos, je me retournais brusquement pour voir la personne qui s’adressait à moi mais ne vis rien, juste le crâne que j’avais jeté.
Il se trouvais là, sur un rocher... Je le dévisageait lorsque sa mâchoire se mit à bouger.

Manquer de respect à un cadavre est le pire des affronts envers le royaume des morts. Tu as le choix entre mourir maintenant ou passer quelques jours dans l’autre monde pour purger ta peine.

Je ne comprenais rien de ce qui se passait, ce crâne me parlait-il vraiment ? Ou étais-je devenu fou ?
Quoi qu’il en soit, je voulais connaître le fin mot de cette histoire, j’avais donc pris la parole à mon tour :

Qui... Qui êtes-vous ?
Je suis celui qui sert de portail entre le monde des mortels et celui des morts. Je n’ai donc pas de temps à perdre. La mort ? Ou la rédemption ?

Je n’arrivais pas à m’exprimer, ma voix tremblotante n’arrangeait pas la situation.

Je crois que je n’ai pas le choix, je vais donc me résigner à la Rédemption. Après tout, c’est mieux que la mort...

Mouahahahahahahahahahahahaha ! Mieux que la mort, j’en doute... Mais quoi qu’il en soit, tu as fais ton choix.

J’étais resté figé par son rire sadique... Mais pendant que je me repassais encore ce rire dans ma tête, le crâne commençait à flotter et des os volaient vers lui, s’assemblaient et formaient à un corps, une cape noire commençait à se former sur son corps puis une faux venait s’ajouter à la panoplie... C’était la grande faucheuse...
Elle murmurait quelques mots impossibles à comprendre.
Tous les cadavres qui se trouvaient là s’étaient levés, s’étaient mis à marcher en direction d’un vortex que la Grande Faucheuse venait de former pour y envoyer toutes les personnes mortes sur ce champ de bataille. Je regardais le spectacle étonné quand mon corps se faisait soudainement attirer par le vortex. Je décollais du sol petit à petit et étais projeté dans ce trou noir.
Je n’avais rien compris mais en l’espace d’un instant je me retrouvais sur Cyrosh. Les nuages étaient jaunes, le ciel très sombre, des gens morts s’y promenaient, le Garde des Ombres saccageait tout sur son passage comme sur Nedmor...

Tu vas devoir passer 5 jours dans ce monde, ce que tu vas y voir va te laisser des traces indélébiles dans ta mémoire... Rien ne t’est interdit dans le monde de la mort. Mais un conseil, ne profite pas trop de cela, il se pourrait que tu ne veuilles plus rentrer et que tu restes coincé ici à jamais.

Je me demandais ce que j’allais devenir... Les bruits des oiseaux étaient remplacés par des cris d’agonie visiblement. J’étais épuisé, je voulais à tout prix dormir... Je cherchais donc un coin tranquille....